Cuba : Pour une critique militaire et géopolitique de Fidel Castro et du Castrisme .
Publié le 4 Décembre 2016
Il n'est pas question ici de défendre le bilan politique et social de Fidel Castro ou de le mettre en accusation . Je laisse ce soin à ses thuriféraires syndiqués comme Bleitrach , Dedaj , Mélenchon ou Ortiz , voir à ses groupies de dernière heure comme Ségolène Royal . Le propos est de faire la " critique des armes " comme écrivait Régis Debray ou la " critique du terrain ". C'est la critique du chef militaire, il passa une grande partie de sa vie en treillis , et au delà du chef géopolitique .
Pour ce faire ce je vous propose des lectures datant déjà de quelques années, de plusieurs décennies même. Elles brisent de nombreux mythes comme celui d'un chef militaire compétant ayant choisi dés le début un théâtre d'opérations pour sa guérilla . Il faut tout d'abord signaler que la première action militaire commandée sur le champ de bataille par Fidel Castro, l'attaque le 26 juillet 1953 de la caserne de la Moncada , fut un échec sanglant .
Voyons donc les autres sources :
1- Revue HÉRODOTE n°5 de Juillet 1977
Le géopolitologue Yves Lacoste , anti-impérialiste un temps proche du PCF , nous explique pourquoi la révolution Cubaine fut un succès quasi-miraculeux et pourquoi toutes les autres révolutions Latino-Américaines basées sur le modèle Castriste furent un échec.
Après avoir erré au milieu de plantations de propriétaires enrichis prêts à le dénoncer , Fidel Castro et son groupe de combat ont eu la chance de pénétrer dans la Sierra Maestra par l'une des deux seules vallées que le pouvoir central de Batista ne contrôlait pas en raison de son peuplement récent. Ses habitants y avaient aussi développé une culture de résistance armée face aux latifundiaires de la plaine et ont donc été opérationnels dés leur ralliement au petit groupe survivant de Fidel Castro .
Yves Lacoste souligne que le choix d'un théâtre d'opérations en montagne fut la conséquence d'errements après un débarquement raté et une quasi-destruction du groupe de combat Castriste qui fut presque anéanti lors de la bataille de Alegria del Pio . Cette défaite militaire, la seconde sous commandement directe de Fidel Castro , étant du à une progression dans une région sans couvert végétal vis à vis de l'aviation gouvernementale. Les pertes dans cette bataille - 60 guérilléros sur 82 soit près de 3/4 de l'effectif initial - furent donc bien des pertes au combat et non pas des exécutions de prisonniers tel que le présente l'histoire officielle du régime . Comme le souligne Yves Lacoste le plan initial de Fidel Castro était de réaliser un soulèvement de type Moncadien dans les centres urbains de l' Oriente et non pas de mener une guérilla montagnarde. Ce n'est qu'après coup que le mythe Castriste développa la légende de la montagne révolutionnaire contre la plaine et les villes réactionnaires ( voir caricature ) . Yves Lacoste explique aussi à l'aune de la géographie et de l'histoire pourquoi une partie de la Sierra Maestra proche de Santiago de Cuba fut le siège d'une guérilla Anti-Castriste dont la réduction nécessita le transfert forcé de plus de 40 000 personnes sur un modèle " Trinquiero-Algérien".
Ce malentendu fit que le modèle Castriste de révolution échoua partout ailleurs pour 2 raisons :
1- Les paysans en voie d’enrichissement , même par un simple commerce dominical , ont toujours préféré se ranger du côté du gouvernement plutôt que des révolutionnaires Marxistes . Ce fut le cas en particulier en Bolivie où le "Che " a été trahi par des paysans " petits-propriétaires " qui vendaient occasionnellement un cochon pour s’acheter un poncho et des piles pour leur poste de radio . ( voir l'analyse de Thomas Varlin dans Hérodote n°5 )
2- La théorie du " foco " suggérait l’existence d’une " avant-garde " menée par un " homme providentiel " qui propage la révolution à partir d’un maquis vers les centres urbains, miniers ou industriels.
Ce faisant les masses de prolétaires urbains ou des centres de productions miniers ne sont plus le centre de gravité et les acteurs du processus révolutionnaire mais un objectif à rallier au processus .
2- Revue HÉRODOTE Unité et diversité du tiers-monde III - Foyers révolutionnaires dans les montagnes , Amérique Latine et Afrique du Nord -1980
C'est une reprise plus fournie de la revue précédente.
3- Revue " Champs de Bataille" N°38 de Février-Mars 2011
L'excellentissime revue " Champ de bataille" qui a cessé de paraître en ce début d'année 2016 après la faillite de son éditeur a consacré deux numéros à l'analyse militaire et géopolitique du Castrisme.
Le numéro 38 sous la plume de Frédéric Ortolland nous fait une description minutieuse des préparatifs et des combats, heure par heure et minute par minute presque , de l'affaire de " La Baie des Cochons " . Un monument de précision concise à partir d'une documentation bibliographique conséquente en langue Anglaise. Comme pour beaucoup d'articles de cette regrettée revue.
4- Revue " Champs de Bataille" N°39 d'Avril-Mai 2011
L'intervention Cubaine en Afrique fut un des piliers du renouveau du mythe Castriste qui commençait à s'essouffler au début des années 80. Cette intervention si elle fut un succès militaire et géopolitique du Castrisme, mais certainement pas de Fidel Castro qui n'a jamais dirigé les opérations militaires sauf devant une caméra , n'en fut pas moins très couteuse pour la nation Cubaine . Un cout en vie humaines mais aussi un cout en terme économique pour une économie exsangue et maintenue sous perfusion . Cout sanitaire aussi puisque ce sont les militaires Cubains déployés en Afrique qui amèneront le virus du SIDA à Cuba . Cette intervention révélera aussi les tensions entre les politiques et l'armée avec le procès et l'exécution du général Arnaldo Ochoa Sánchez.
Frank Boulle remet en perspective cette intervention avec un article sur la bataille de Cuito Cuanavale .