Kulturkampf : Interview de Tamara Igoumnova, une responsable des expositions du Musée Historique de Moscou

Publié le 27 Février 2010

Source : Ria Novosti

-Pourriez-vous parler du contenu de cette exposition? Qu’est-ce que le public français va-t-il apprendre sur la Russie grâce à cette exposition?

- En ce qui concerne le nombre de participants (musées, archives, bibliothèques) l’ampleur de l’exposition est extraordinaire dans le cadre de l’Année France-Russie. Pour la première fois le public français pourra voir les aspects inconnus de l’histoire russe, en particulier l’influence byzantine sur l’art de l’ancienne Russie, le développement de cet art conservant à la fois les origines et les traditions de Byzance et apportant une originalité russe par des traits nationaux, sauvegardés strictement pendant dix siècles jusqu’au 18ème siècle, période de Pierre 1er et de l’ouverture de la Russie à l’Europe Occidentale. Au début du 18ème siècle les relations diplomatiques sont établies entre la Russie et la France grâce aux deux Grandes ambassades (mission diplomatique et éducative) de Pierre 1er en Europe. Au 18ème siècle le processus de compréhension mutuelle et d’influence réciproque des cultures entre la Russie et la France était à leur apogée. La France était toujours intéressée par la Russie, par son âme mystérieuse.

-A votre avis, pourquoi cette exposition est considérée comme l’événement le plus important de l’Année France-Russie?

La France et la Russie ont réalisé ensemble beaucoup de projets d’expositions et présenté les collections de leurs meilleurs musées. Pourtant la période à partir de la conversion au christianisme en Russie au 10ème siècle et jusqu’aux reformes de Pierre 1er restait mal connue. L’exposition « Sainte Russie » qui aura lieu au Louvre, a rassemblé pour la première fois des œuvres des 25 plus grands musées nationaux de Russie : l’Ermitage, le Musée Russe, la galerie Tretiakov, le musée du Kremlin de Moscou, le Musée Historique, les archives des anciens actes ainsi que des musées régionaux dont certaines œuvres seront exposées à l’étranger pour la première fois. Comme le Musée de Serguiev Possad, le Musée de la Nouvelle Jérusalem, le Musée du Kremlin de Rostov, les musées de Pskov et de Iaroslavl.

Au début du 20ème siècle, en 1911, pour la première fois la collection d’art russe de la princesse Dénichera a été exposée sur le territoire du Louvre, dans l’aile droite où se trouve le musée des arts décoratifs. C’était la première rencontre du public français avec les antiquités russes: icônes, objets religieux, broderie précieuse. Ainsi l’intérêt était suscité depuis longtemps. Et à présent plus de 400 œuvres d’art russe ancien seront présentées à l’exposition « Sainte Russie » en ce début de 21ème siècle, y compris les icônes des 14-17 siècles : les icônes de Théophane le grec, d’Andrei Roublev. Pour nous c’est le b.a.-ba, pour les connaisseurs d’art occidentaux c’est une innovation.

- Comment caractérisez-vous la coopération avec le musée du Louvre? Quelle attitude envers l’exposition "Sainte Russie" avez-vous ressenti?

-Ce n’est pas ma première expérience avec le Louvre. Je peux même faire un compliment aux partenaires français, ils sont très attentifs. Avec eux nous pouvons discuter de n’importe quels problèmes et nous trouvons toujours une solution qui convient aux deux parties. Nous nous comprenons parfaitement. Ils ont étudié en détail la période de l’histoire russe de "Sainte Russie", en plus les spécialistes français pouvaient choisir des pièces pour l’exposition et ils ont fait attention aux œuvres exceptionnelles. Plusieurs musées russes, comme le Musée Historique, ont exclu certaines pièces de l’exposition. Nous aussi, nous avons exposé quelques œuvres des musées français et personne ne nous les a jamais refusé. Par exemple on nous a donnés des affaires personnelles de Napoléon Bonaparte pour une exposition "Napoléon et Alexandre. Les Grands Empereurs d’Europe".

Le Président-directeur du Louvre Henri Loyrette est un grand amateur et connaisseur de l’histoire et de l’art russe. Cette exposition est due à l’initiative des collègues français, des représentants du musée le Louvre. Par exemple l’époque des guerres napoléoniennes était déjà bien connue. Il y a eu des expositions et des événements. Cette époque est plus proche et plus connue. Mais une question restait en suspend, comment était-elle, la Russie avant cette époque, avant l’influence de l’art occidental. C’est un honneur pour nous d’organiser une exposition russe de grande envergure à Paris dont les objets exposés sont uniques.

-Quels sont les œuvres les plus intéressantes pour les visiteurs du Louvre? Racontez-nous, s’il vous plaît, leurs origines?

-J’aimerais mettre en valeur des œuvres qu’on avait peur d’incorporer à l’exposition comme le châssis en or de la Trinité de Roublev, les portes en or de la ville de Souzdal, l’iconostase funèbre de la tsarine Sofia du couvent Novodievitchi, les lettres d’Ivan III, les lettres du concile œcuménique entérinant le patriarcat en Russie en 1590, l’icône des saints-martyrs Boris et Gleb du 14 siècle, des manuscrits uniques, par exemple les manuscrits de l’époque d’Ivan le Terrible dont il ne reste que 10 feuillets avec 16 mille miniatures créées durant dix longues années. 

Tous les conservateurs étaient inquiets des conditions de sécurité pendant le transport et l’exposition dans les salles du Louvre, ainsi que des conditions d’assurance. Je pense qu’on a pris une telle décision grâce aux relations amicales entre les deux Etats ainsi qu’entre les collègues de musées.

En tant que coordinatrice du projet j’ai été à Paris au Louvre et j’ai parcouru tous les endroits où les caisses seront déchargées et conservées, j’ai examiné les coffres, contrôlé l’emballage et désemballage des pièces uniques etc. Et je me suis assurée du respect des conditions de sécurité qui correspondent à nos demandes et aux normes techniques. Le retour des œuvres exposées est garanti par l’État.

-Envisagez-vous à l'avenir de poursuivre la coopération avec les musées de France en vue d’apprendre aux Français l’histoire et la culture russes?

- L’Année France-Russie est une sorte d’acompte d’Etat. Il y a un support économique et médiatique. Je suis sûre que l’exposition qui se tient dans le cadre de l’Année éveillera l’intérêt des Français à la culture russe et sera le premier pas dans le développement de la coopération entre les musées français et russes. En automne il y aura lieu une exposition à Moscou consacrée à l’époque de Napoléon. On aura des œuvres de Versailles, de Fontainebleau, du musée Carnavalet, du Musée de l’Armée, du Louvre. Bien qu’au départ je n’avais demandé aux collègues français que le "Sacre de Napoléon" de David. Mais on m’a expliqué que c’était un tableau de très grand format, que la question de son transport pouvait poser problème et puis on m’a demandé ce que j’allais faire avec. Mais on aura quand même une grande quantité d’œuvres de l’époque de Napoléon, une exposition complète.

Note de l'Editeur :
Depuis mercredi a débuté au Théatre Toursky à Marseille , c'est juste bas de chez-moi , le XVI ème Festival Russe .

Rédigé par DanielB

Publié dans #2010 : L'Année de la Russie en France

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