Nous fêtons aujourd'hui un jubilé , le 75éme anniversaire de la victoire du 8 mai 1945 . Je préfère parler d'un autre anniversaire , tout juste distant de 5 ans et 48 heures : Les 80 années de notre déroute militaire du 10 mai 1940 .
De nombreux événements devaient couvrir dans le Grand-Est , dans l'Aisne et jusque dans le Dunkerquois et la Somme les célébrations de ces batailles du 10 mai 1940 au 5 juin 1940 . Je comptais y assister . Elles ont été malheureusement annulées en raison de l'épidémie de Coronavirus qui frappe plus particulièrement ces régions .
C'est toujours facile de refaire l'histoire à posteriori , en particulier pour rechercher les prémices d'un événement que l'on considérait comme imprévisible dans le domaine militaire . Je ne serai pas le premier à vous démontrer que notre défaite du 14 mai 1940 était " prévisible " mais peut-être je serai le premier à vous affirmer que cinq années avant le 10 mai 1940 de jeunes enfants Allemands pouvaient s'entrainer à franchir la Meuse à Sedan dans leur chambre à coucher !
Je pense que tous mes - derniers - lecteurs connaissent la manière dont se déroula le désastre du 10 mai 1940 et comment la Meuse fut franchie le 14 mai 1940 .
Au besoin je vous fournis trois livres " de base " que je considère comme les meilleurs sur le dossier à défaut d'être les plus récents . Leurs auteurs ont le mérite d'avoir rencontré les témoins et acteurs même de cette opération car nous sommes souvent à peine 25 ans après les faits. L'avocat Claude GOUNELLE les a vécus . Je regrette juste de ne pas l'avoir rencontré car il est décédé à Marseille il y a à peine cinq ans ...
Ce serait comme écrire aujourd'hui sur les " événements " du Rwanda survenus en 1994 ou sur la guerre en Ex-Yougoslavie .
Avant de vous montrer ces documents époustouflants quand on connait la suite de l'histoire je vous propose un autre document qui prend toute sa valeur ... Huit années plus tard !
Il s'agit de la description des manoeuvres de la Reichswehr d'octobre 1932 dans la région de Francfort et sur la rivière Oder . Ces photos publiées dans l' hebdomadaire " Miroir du monde " N°136 du 1er octobre 1932 on aurait pu les prendre huit années plus tard dans l'est de la France : Un véhicule blindé sur un ponton qui franchit l'Oder et des fusillers-motocyclistes qui analysent une carte pour préparer la progression d'une colonne motorisée .
Le second document constitue le coeur de cet article : Ce sont les photos du catalogue 1937-1938 de la firme Hausser™qui produisait les jouets Elastolin™ tant prisés des collectionneurs dont je fais partie . Les jeunes Allemands disposaient de sets complets pour simuler dans leur chambre un franchissement de rivière ou de fleuve , que ce soit par un ponton , un pont à structure triangulée ou par des petits canots pneumatiques pour l'infanterie ! Ils pouvaient aussi organiser la progression d'une colonne motorisée , selon la fortune de leurs parents .Ces jeux sont loin d'être des " jeux " mais sont de véritables " outils pédagogiques " dans la mesure où ils abordent la notion de " classe de franchissement " .
Je profite ici de cet article pour exorciser un " traumatisme " qui m'a " perturbé " toute ma jeunesse : Mon grand-père m'avait acheté tout minot un numéro de " L'histoire controversée de la seconde guerre mondiale "des Editions ATLAS . Celui consacré à la bataille de Sedan montrait en couverture un blindé Allemand débouchant sur un talus bordant le fleuve . J'ai ainsi cru jusqu'au moment où je me suis intéressé " sérieusement " à l'histoire militaire que les blindés Allemands étaient amphibies . C'est aussi de cette manière que cette bataille me fut présentée par mes profs d'histoire-géo !
Ce qui fait la différence entre les adultes et les enfants c'est la taille des jouets !
Maintenant les livres !
Le premier n'est pas le livre de deux historiens mais d'un comptable et d'un représentant amateurs d'histoire et en particulier d'histoire militaire . Il s'agit de " Dix erreurs , une défaite " de Georges BEAU et Léopold GAUBUSSEAU paru aux Presses de La Cité en 1967 .
Il s'agit d'un livre qui traite des cinq premiers jours de la percée Allemande et qui eut le premier la lourde tâche de réhabiliter le général André CORAP . Les auteurs sont vipérins lorsqu'ils se moquent des services du chiffre de l'Etat Major du général Maurice GAMELIN au château de Vincennes : Ceux ci perdaient parfois plusieurs dizaines de minutes pour chiffrer les informations sur les positions Allemandes transmises par notre aviation de reconnaissance ( Il y en avait une , si ! ) avant de les transmettre aux unités du front . Dont le service du chiffre perdait autant de temps à déchiffrer le message et tout ceci pour que les Allemands ne prennent pas connaissance des positions qu'ils n'occupaient parfois plus depuis 24h ou 48h !
Le second livre est "THE " classique qui a servi de livre de référence pendant au moins vingt années sur l' " affaire " du franchissement de la Meuse et des combats qui s'y sont déroulés . Il s'agit de " Sedan , mai 1940 " de l'avocat et historien Claude ( PETIT-) GOUNELLE publié aux Presses de la Cité en 1980 pour le 40 éme anniversaire des combats .
Bien entendu ce livre ne peut s'apprécier pleinement que s'il s'agit celui avec la couverture rouge , sans aucune illustration . J'y ai eu le plaisir d'y retrouver le 16éme GC .
Le troisième livre est beaucoup plus technique et a été écrit par un militaire . C'est pour cette raison que je le mets en dernier et que je vous en parle " pour la soif " .
Il s'agit de " 1940 , La guerre des occasions perdues " du colonel Adolphe GOUTARD paru en 1956 chez HACHETTE . La thèse centrale de ce livre , préfacé par Mongénéral himself excusez du peu , est de d'imputer au haut commandement Français nos défaites malgré un appareil militaire supérieur , selon lui , à l'appareil militaire Allemand . Celui-ci était en 1940 en fait une '" grenouille qui avait voulue se faire aussi grosse qu'un boeuf " selon le colonel GOUTARD et qui était loin d'en avoir la force ! Il affirme même en conclusion qu' "il y a peu d'exemples dans l'Histoire d'une telle surrestimation de la force de l'adversaire " Le colonel GOUTARD explique une des causes tactiques principales de notre défaite selon lui : La rupture des " bretelles " . Les " bretelles " ce sont les liaisons que le commandement central doit mettre en place pour préserver la " continuité " du front entre des unités qui subissent de manière différente la pression de l'ennemi . C'est encore mieux quand ce sont les commandants des unités concernées qui s'en occupent ...Nota : Il s'agit d'une notion différente de la " position en bretelle " .
Enfin , avant de vous parler dans un autre article des livres sur la campagne de mai 1940 , je vous propose " La gamelle dans le dos " de Robert AUBOYNEAU et Jean VERDIER paru en 1972 chez Arthème FAYARD . Tous les deux ont vécu cette campagne de 1940 , le comédien et le célèbre médecin militaire et ils nous la décrivent jusqu'au rembarquement de Dunkerque dans un style " septièmecompagniesque"