Kulturkampf : Des tablettes de Persepolis à la collection Bergè .
Publié le 24 Février 2009
Alors qu'hier le Musée de Bagdad , amputé de la perte de ses plus belles pièces lors du pillage organisé avec la complicité implicite des coalisés , reouvrait ses portes , deux nouvelles se téléscopent qui montrent que la lutte autour des biens culturels des peuples et des nations fait desormais rage . La Deuxième depêche évoque la " Guerre de l'Opium " auquel le magazine " Champ de Batailles " consacre un article dans son dernier numéro . L'occasion aussi de (re)lire l'excellentissime " Histoire Criminelle du gouvernement Anglais : Depuis le Massacre des Irlandais juqu' à l'empoisonnement desChinois " par Elias Regnault .
On se souviendra aussi que François Mitterand avait créé la polémique en voulant restituer à la Corée du Sud des archives saisies par une expédition militaire Française en Corée au XIX eme siècle .
L' " Ocident" , ce grand donneur de leçons , aurait tord de vouloir se retrancher derrière des arguties juridiques pour couvrir ses trafiquants de biens culurels spolliés au cours des siècles précedents en refusant aux peuples et aux nations spoliées le retour de ces biens . En matière de " spoliations " , il existe desormais des jurisprudences et elles se doivent d'êtres appliquées !
Les tablettes de Persépolis au centre d'un bras de fer judiciaire aux Etats-Unis
Pour les archéologues, les "Archives des fortifications de Persépolis" offrent un témoignage inestimable sur le monde perse d'il y a 2.500 ans. Mais les précieuses tablettes d'argile, actuellement conservées à Chicago, sont au coeur d'une bataille judiciaire sans précédent: les rescapés d'un attentat à Jérusalem en 1997 réclament leur saisie et leur vente pour percevoir des dommages et intérêts.
La collection, sous la garde de l'Institut oriental de l'université de Chicago depuis des décennies, constitue un ensemble de "documents" administratifs de l'époque, mais permet également de mieux comprendre la vie dans ce qui était alors le plus grand empire sur Terre.
Ces vestiges se trouvent aujourd'hui au centre d'une bataille judiciaire. Des rescapés d'un attentat-suicide à Jérusalem en 1997 ont attaqué l'Etat iranien, l'accusant de complicité dans cet acte terroriste. Dans un jugement par contumace, un tribunal fédéral de Washington leur a reconnu le droit de toucher une compensation de 412 millions de dollars (323 millions d'euros).
Leurs avocats ont alors décidé de demander la saisie des tablettes et d'autres vestiges perses conservés à l'université de Chicago et dans des musées, avec l'objectif de les vendre pour permettre l'indemnisation des victimes.
Cette initiative provoque la colère de nombreux scientifiques, qui y voient une tentative de rançonner des trésors culturels et redoutent un dangereux précédent. "Imaginez que dans le cadre de poursuites judiciaires contre nous, les Russes réclament la Déclaration d'indépendance (américaine), la Constitution et la version originale du Discours de Gettysburg (célèbre allocution prononcée par Abraham Lincoln durant la guerre de Sécession, ndlr)!", souligne Gil Stein directeur de l'Institut oriental. "Que dirions-nous?"
La Société des iranologues européens (SIE) a réuni des centaines de signatures dans une pétition appelant le nouveau président américain Barack Obama à intervenir pour empêcher la saisie des tablettes.
L'affaire se révèle très complexe sur le plan juridique. "Historiquement, les pays étrangers sont à l'abri des poursuites", mais depuis quelques années cette immunité est remise en cause, souligne Patty Gerstenblith, professeur à l'école de droit de l'université DePaul.
Lors de l'attentat de 1997, trois kamikazes se sont fait exploser dans un lieu public très fréquenté de Jérusalem, faisant cinq morts et près de 200 blessés. L'action a été revendiquée par le Hamas. Deux groupes d'Américains ont engagé des poursuites, plusieurs d'entre eux ayant été grièvement blessés dans la tragédie.
En attaquant en justice l'Iran et certains de ses dirigeants, David Strachman, un avocat des victimes, a soutenu avec succès la thèse selon laquelle Téhéran avait fourni une aide financière et un entraînement terroriste au Hamas. Le président du tribunal de Washington a estimé qu'il existait des "preuves claires et convaincantes" de ce que la responsabilité de l'Iran était engagée.
Toutefois, le magistrat n'a pas dit si les avoirs de l'Iran pouvaient être confisqués. Et Téhéran peut compter sur un allié improbable dans cette affaire: le ministère américain de la Justice, qui a estimé à trois reprises que les tablettes ne devaient pas être saisies, selon Thomas Corcoran, un avocat représentant le gouvernement iranien.
Les tablettes sont également convoitées dans le cadre d'une autre affaire: un avocat tente d'obtenir la saisie de la collection et d'avoirs iraniens pour indemniser les familles de 241 militaires américains tués dans un attentat-suicide à Beyrouth en 1983.
La précieuse collection, composée de dizaines de milliers de tablettes et fragments, a été découverte par des experts de l'université de Chicago dans les années 1930 alors qu'ils construisaient une rampe dans la cité antique de Persépolis. "Ils ont rapidement compris qu'ils avaient trouvé quelque chose d'extraordinaire", déclare Matt Stolper, gardien temporaire des tablettes, et l'une des rares personnes au monde à comprendre l'élamite, la langue complexe ancienne dans laquelle beaucoup de ces écrits en caractères cunéiformes ont été rédigés.
Au fil des décennies, des milliers de tablettes ont été restituées à l'Iran après avoir été soigneusement étudiées et répertoriées. Lorsque l'Institut oriental a annoncé qu'il allait en rendre une nouvelle série à Téhéran en 2004, Me Strachman y a vu une opportunité pour ses clients. L'avocat affirme avoir été contacté par des musées intéressés souhaitant enrichir leurs collections, et assure ne pas avoir l'intention de vendre les pièces à des collectionneurs privés, s'il obtient gain de cause.
Alors que l'affaire suit son cours devant la justice américaine, Gil Stein, directeur de l'Institut oriental, s'inquiète de ses possibles conséquences sur le plan culturel. "Elle pourrait avoir un effet mortel, glacial sur toute sorte d'échanges culturels à l'avenir", prévient-il. AP
Le gouvernement chinois a adressé il y a quelques jours un courrier à la maison Christie's lui demandant de bloquer la vente de deux bronzes chinois dans le cadre de la dispersion aux enchères de la collection d'Yves Saint Laurent et de Pierre Bergé, a rapporté mardi l'agence officielle Chine nouvelle.
Ce courrier est daté du 17 février, soit cinq jours avant la décision du juge des référés du tribunal de grande instance de Paris qui a autorisé lundi la vente de ces deux bronzes, une tête de lapin et une autre de rat, qui appartiennent actuellement à la Fondation Yves Saint Laurent et qui doivent être vendues aux enchères mercredi soir.
"Nous avons demandé (à Christie's) de bloquer les enchères et nous espérons que les parties comprendront et respecteront cette demande appropriée du peuple chinois", a rapporté Chine nouvelle, citant un communiqué de l'Administration du patrimoine culturel chinois. Un porte-parole de cet organisme a affirmé que Christie's avait répondu à ce courrier, mais a refusé de dévoiler le contenu de cette réponse.
Christie's a déjà fait l'objet à Paris d'une assignation en référé de la part de l'Association pour la protection de l'art chinois en Europe (APACE) qui tentait de bloquer la vente des deux reliques de la dynastie Qing (1644-1911) qui décoraient le palais d'été impérial Yuanmingyuan à Pékin avant d'être volées lorsque le palais a été brûlé par les forces franco-anglaises durant la deuxième guerre de l'Opium en 1860.
L'APACE, qui affirmait vouloir défendre le patrimoine culturel chinois mais ne pas agir au nom du gouvernement de Pékin, a été déboutée et condamnée à verser 1.000 euros d'amende à Christie's et 1.000 euros à Pierre Bergé et Associés.
Mardi, le gouvernement chinois a par ailleurs jugé "ridicules" les propos de Pierre Bergé, qui a fait savoir dans plusieurs médias français qu'il était prêt à rendre les bronzes à la Chine si celle-ci faisait plus pour les droits de l'Homme, notamment au Tibet.
Ma Zhaoxu, porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, a estimé qu'un tel échange n'était pas envisageable et que la vente des bronzes était une offense faite au peuple chinois.
"Bafouer les droits culturels de Chinois sous le prétexte des droits de l'Homme, c'est juste ridicule", a-t-il déclaré. "Dans l'histoire moderne, les pouvoirs impériaux occidentaux ont volé beaucoup d'antiquités, notamment celles du Palais d'été. Ces reliques culturelles doivent être rendues à la Chine".
A Hong Kong, quelques personnes ont manifesté mardi devant le consulat français pour demander le retour des bronzes. "La France a la responsabilité morale de rendre les deux bronzes intacts à la Chine", a déclaré Chan Hak-kan, député de Hong Kong pro-chinois.
Les deux reliques pourraient être vendues 13 millions d'euros chacune, selon les estimations réalisées avant le début de la dispersion de la collection. AP