De l'or, du cuivre, du lithium … Des géologues américains ont découvert dans le sous-sol afghan de gigantesques réserves de minerais, dont ils ont évalué la valeur à mille milliards de dollars, a rapporté lundi le New York Times . [ 1 ]
La découverte a été faite par une petite équipe de géologues et responsables du Pentagone. Selon le quotidien américain, ils se sont appuyés sur des cartes et des données collectées par les experts miniers russes durant l'occupation soviétique des années 1980. Après le retrait de l'URSS, les géologues afghans avaient caché ces documents pour ne les ressortir qu'après la chute des talibans en 2001. [ 3 ]
A en croire des responsables de l'administration américaine cités par le journal, ces gisements, répartis dans tout le pays, seraient suffisants pour en faire un des premiers exportateurs mondiaux de minerais. Par exemple, ses seules réserves de lithium - un composant très recherché, utilisé pour les batteries des téléphones et des ordinateurs portables - placeraient l'Afghanistan au niveau de la Bolivie, pour l'instant détenteur des premières réserves mondiales. Une note interne du Pentagone évoque même une «Arabie saoudite du lithium».[ 2 ] Kaboul pourrait également devenir un des leaders mondiaux de la production de fer et de cuivre. Parmi les autres découvertes, d'importants gisements de niobium - un métal utilisé pour produire de l'acier supraconducteur -, d'or et de cobalt.
«Beaucoup de si»
«Cela deviendra l'ossature de l'économie afghane», a estimé Jalil Jumriany, conseiller du ministère afghan des Mines. «Il y a là-bas un potentiel stupéfiant», s'est exclamé pour sa part le général américain David Petraeus, chef d'état-major général, précisant toutefois qu'«il y a bien sûr beaucoup de ‘si'». Le premier d'entre eux est la capacité à exploiter ces richesses. Ravagé par la guerre, l'Afghanistan ne dispose pour le moment pas des infrastructures minières et industrielles nécessaires. Selon les responsables américains, il faudra des décennies pour qu'elles se mettent pleinement en place.
Deuxième hypothèque qui pèse sur ce potentiel minier : les convoitises qu'il suscite. A l'intérieur des frontières afghanes d'une part, où les résistances des groupes rebelles du sud et de l'est pourraient bien être exacerbées par la perspective d'exploitation de tels filons. Celle, d'autre part, des puissances régionales - la Chine et l'Inde, voire la Russie - qui pourraient bien s'impliquer davantage dans la géopolitique déjà complexe de l'Afghanistan. Deux entreprises chinoises se sont déjà engagées à investir quatre milliards de dollars dans la mine de cuivre d'Aynak, au sud de Kaboul, soit le plus important investissement étranger civil à ce jour dans le pays.
Enfin, dans un pays déjà ravagé par la corruption, la découverte d‘un tel magot sonne comme un défi. L'Afghanistan devra faire de gros progrès en matière de gouvernance pour ne pas être victime, comme tant d'autres avant lui, de la «malédiction des matières premières» et pour que celles-ci soient réellement facteur de développement. Le président Hamid Karzaï, qui a été récemment informé de ces découvertes par un responsable américain, a donc du pain sur la planche.
Une première évaluation de la présence de minerais en Afghanistan devrait être présentée le 20 juillet à Kaboul lors d'une conférence internationale et s'accompagner de l'ébauche d'une politique d'exploration, a indiqué lundi le ministère français des Affaires étrangères.
Ces gisements, qui comprendraient également du fer, de l'or, du niobium et du cobalt, seraient suffisants pour en faire un des premiers exportateurs mondiaux de minerais.
"Les autorités afghanes ont entrepris, avec l'appui de leurs partenaires, de recenser les ressources naturelles présentes dans le sous-sol afghan et du potentiel qu'elles représentent pour permettre au pays d'assurer à terme son développement économique", a déclaré lors d'un point-presse la porte-parole adjointe du ministère français, Christine Fages.
"Un premier état des lieux devrait être présenté à l'occasion de la conférence de Kaboul le 20 juillet, a-t-elle ajouté. Il devrait s'accompagner des premiers éléments de la nécessaire politique d'exploration et d'exploitation des ressources minières qui reste encore à définir"
"La France, comme ses partenaires présents en Afghanistan, oeuvre, aux côtés du gouvernement afghan, à la mise en valeur des potentialités humaines et économiques de ce pays", a déclaré Christine Fages. "Cette mise en valeur, qui doit s'inscrire dans le cadre d'un développement durable, constitue un élément essentiel du relèvement de l'Afghanistan en faveur duquel la communauté internationale est mobilisée", a-t-elle précisé.
Liens :
[ 1 ] U.S. Identifies Vast Riches of Minerals in Afghanistan
[ 2 ] Lithium: l’Afghanistan serait assis sur une mine d’or
[ 3 ] Геологическая энциклопедия - Афганистан - Données 1982 .
Note de l'Editeur :
Il ne s'agit pas là d'une révélation mais bien d'une confirmation de ce que disaient certains analystes au début de la " guerre contre le terrorisme " en 2001 .
Des le début des années 80 la revue Soviétique Spoutnik faisait état des richesses minières Afghanes révélées par le travail des géologues Soviétiques qui ont payé un lourd tribut pour ces découvertes . Les équipes de géologues Soviétiques étaient systématiquement attaquées et massacrées par les " combattants de la liberté " sponsorisés par Ronald Regan et déja le conflit Afghan d'alors s'inscrivait , comme le conflit contemporain , dans le cadre d'une guerre pour le contrôle des matières premières .
Cette " guerre secrête " a été marquée par l'enlèvement du chef de la mission géologique Soviétique , Mikhail Evgueni Okrimyuk - Евгений Охримюк - , en plein centre de Kaboul en septembre 1981 .Un enlévement réalisé avec la complicité de son chauffeur recruté par l'ISI Pakistanais . Il était alors agé de 68 ans . Mikhail Evgueni Okrimyuk travaillait pour le gouvernement Afghan depuis 1976 et était parent avec un membre du Politburo du PCUS et certains analystes pensent que ses rapports ont influencé la décision Soviétique d'intervenir en A-stan .
Aprés des tentatives infructueuses de médiation du CICR , Mikhail Evgueni Okrimyuk fut exécuté par les " combattants de la liberté et de la démocratie " certainement dans les géoles de l'ISI , les services de renseignements Pakistanais .
Une autre victime célèbre fut le géophysicien Alexei Lieberman - Алексей Либерман - exécuté sur les marches de l'Institut Polytechnique de Kaboul au terme d'un " contrat " .
Les attaques récurrentes contre le gisement de cuivre d' Ainako obligeaient les Soviétiques à livrer le matériel minier et à évacuer le minerai par convois escortés par des véhicules blindés et quelquefois au moyen d'hélicoptères de combat .
Les premieres découvertes d'importance concernant l'Uranium faites par le géologue Anatoly Demin datent de 1962 [ Voir photo ] .
Il reste à présent de s'interroger pour connaitre le timing de la révélation au " grand public " de ce lapin caché dans un chapeau . Cette révélation officielle de ce qui se savait depuis le début des années 80 vient mettre un terme définitif à la légende savamment orchestrée de la " guerre du droit " de la coalition en Afghanistan .
Il est aussi interressant de noter que les métaux appartenant à la géopolitique des ressources du XIX ème siècle , le fer , le cuivre et l'or , interviennent pour les 3/4 de la valeur estimée de ces ressources alors que le Niobium , les terres rares et le Lithium n'interviennent que pour 10 % .
Bibliographie conseillée
Путешествия по Памиру - Павел Лукницкий - Mission géologique Soviétique en Asie Centrale dans les années 30 .
Spoutnik -Digest de la Presse Soviétique - Années 1982 - 1983 - 1984 - 1985
APN Novosti
Afghanistan: The First Five Years of Soviet Occupation - J. Bruce Amstutz - National Defense University .